Renault 8 Gordini : rien n'est logique avec elle !

Renault 8 Gordini : rien n'est logique avec elle !

Un enfant aurait pu en faire le dessin, son architecture était dépassée et sa tenue de route aléatoire et pourtant, la Renault 8 Gordini devint rapidement la coqueluche des pilotes du dimanche. Une situation incroyable tant ce seront ses défauts qui lui donnèrent tant de qualités. Succès à l'époque, culte aujourd'hui, la R8 Gordini, surnommée affectueusement la Gord', n'en finit pas de séduire rejetant même sa plus moderne héritière, la Renault 12 Gordini, au rayon des échecs. Mais qu'est ce que la 8 Gordini a de plus que les autres ?

Renault 8 Gordini

Le sorcier Gordini

Il n'y a effectivement pas de logique avec la Gordini : certes, son moteur est passé entre les mains du « sorcier », Amédée Gordini, mais il restait un « petit » 1 100 cc, pour 77 chevaux. Même en 1 300, on n'atteignait pas plus de 88 chevaux. Mais en 1964 pour la 1ère et en 1966 pour la seconde, ces écuries suffisaient largement, d'autant que la R8 dérivait de la Dauphine, avec son architecture tout à l'arrière. Avant même de pouvoir exploiter tous les chevaux du moteur, encore fallait-il savoir cravacher la bête malgré le lourd sac à dos.

Alors que la traction ne cessait de gagner du terrain, c'est paradoxalement cette architecture dépassée qui fit le succès de la 8 Gordini : en tirer la quintessence n'était pas donné à tout le monde, et s'offrir une Gord' c'était aussi prouver qu'on en avait dans le pantalon. Pour exploiter les petits moteurs d'Amédée Gordini, il fallait d'abord avoir compris le transfert des masses, le braquage contre braquage. 

Du pilotage, du vrai, en Renault 8 Gordini !

A cette époque, l'automobile est encore en vogue et les jeunes garçons comme les jeunes adultes se passionnent pour le sport automobile. Avec la Gord', c'était le plus sûr moyen de toucher du doigt cet espoir de se faire repérer, dans les compétitions locales ou dans celle, monomarque, de Renault. Un volant était peut-être en jeu. Une R8 même en version Gordini, c'était tout de même moins cher qu'une Alpine A110 (bien que pas donnée quand même) et cela pouvait donner les mêmes sensations (en tout cas les mêmes impressions de pilotage). 

Renault 8 Gordini

Et puis la couleur bleu « France », les bandes blanches, les deux phares ronds et la tête au carré agressive de la petite bombe de Renault, ça en jetait dans cette France insouciante des Sixties où la sécurité routière n'était pas encore un enjeu national. On pouvait envoyer du lourd sur les départementales, à ses risques et périls : une génération qui ne garde que les bons souvenirs aujourd'hui mais qui aura aussi connu son lot de morts au détours d'un virage, enroulé au platane !

La nostalgie d'une certaine époque

Et oui, la passion et la nostalgie font parfois oublier des défauts bien réels (et parfois dangereux). Certes, la R8 Gordini pouvait être une école de pilotage, mais aussi un engin de mort. Mais il faut le reconnaître, dans la philosophie elle se rapprochait des GTI des années 80, des petites sportives rapides, agréables, pas trop chères ni trop aseptisées.

Renault 8 Gordini

Avec moins de 12 000 exemplaires produits entre 1964 et 1970, la Renault 8 Gordini n'en reste pas moins rare. Beaucoup se souviennent avec émotion de leur R8, criant aujourd'hui qu'il s'agissait d'une Gord' alors que probablement, ce n'était qu'une R8S, le modèle d'en dessous moins cher et moins puissant ! Aujourd'hui, les nostalgiques de cette époque se l'arrache en se pinçant du nez devant la traîtresse R12 Gordini passée, elle, en traction. Une voiture pourtant bien séduisante et pas inintéressante, en tout cas sûrement plus sécurisante.

Auteur : Luis Perenna