Sécurité routière : Baisse des décès cet été, à nuancer.

Sécurité routière : Baisse des décès cet été, à nuancer.

Le nombre de morts sur les routes de France métropolitaine a enregistré une baisse de 4 % pendant la période estivale de juillet à août 2024, avec 569 personnes tuées, selon la Sécurité routière. Si cette diminution est une nouvelle encourageante, elle ne doit pas occulter certaines incohérences persistantes dans le système de sanctions routières. En effet, tandis que les infractions mineures sont souvent sanctionnées immédiatement et sévèrement, les grands délinquants de la route semblent parfois échapper à une justice rapide.

Des chiffres en demi-teinte

En août, 291 personnes ont été tuées sur les routes de France métropolitaine, soit une hausse de 2 % par rapport au même mois l'an dernier. Juillet avait, quant à lui, enregistré une baisse notable de 9 % avec 278 décès contre 306 un an plus tôt. Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la Sécurité routière, a souligné que « le bilan de cet été est globalement plus favorable que l'été dernier », tout en déplorant une hausse de la mortalité chez les usagers vulnérables : cyclistes et utilisateurs de deux-roues motorisés.

La hausse est particulièrement marquée pour les cyclistes avec 32 tués en août, soit 9 de plus qu'en 2023. Les usagers de deux-roues motorisés ne sont pas en reste avec 97 décès, soit une augmentation de 4 personnes. En revanche, le nombre de décès de piétons est en baisse, ce qui tempère légèrement le tableau.

Des sanctions à deux vitesses ?

Ces statistiques soulèvent la question de l'efficacité et de l'équité des sanctions routières en France. D'un côté, les infractions mineures, comme un léger excès de vitesse ou un stationnement interdit, sont souvent sanctionnées immédiatement et sans indulgence. Les automobilistes reçoivent leurs contraventions rapidement, avec des amendes parfois disproportionnées par rapport à l'infraction commise.

De l'autre côté, les grands délinquants de la route, responsables d'accidents graves ou récidivistes notoires, semblent bénéficier de délais de jugement plus longs. Les procédures judiciaires s'étirent, les sanctions tombent tardivement, laissant les victimes et leurs familles dans l'attente d'une justice qui tarde à venir.

L'affaire du chauffard multi-récidiviste

Un cas récent illustre cette situation. Un automobiliste, déjà condamné plusieurs fois pour conduite en état d'ivresse et sans permis, a causé un accident mortel cet été. Malgré la gravité des faits, son procès n'aura lieu que dans plusieurs mois, le laissant libre pendant ce temps. Pendant ce laps de temps, il pourrait potentiellement commettre de nouvelles infractions, mettant en danger la vie d'autrui.

Cette situation contraste avec celle de nombreux conducteurs lambda, qui reçoivent des amendes pour des infractions mineures en quelques jours, sans possibilité de contestation immédiate.

Les conséquences d'un système inéquitable

Cette disparité dans le traitement des infractions routières engendre un sentiment d'injustice chez les citoyens. Elle peut également avoir un impact sur le respect des règles de conduite. Si les sanctions ne sont pas perçues comme justes et proportionnées, la dissuasion s'affaiblit.

De plus, la lenteur des procédures pour les infractions les plus graves peut donner l'impression que la société tolère, voire excuse, les comportements les plus dangereux. Cela est d'autant plus préoccupant que la mortalité sur les 12 derniers mois est en hausse de 6 % par rapport à la période précédente, selon la Sécurité routière.

La nécessité d'une justice plus réactive

Pour inverser cette tendance, il est crucial de repenser le système de sanctions routières. L'objectif n'est pas de retarder toutes les sanctions, mais bien de les appliquer de manière immédiate et équitable, quel que soit le degré de gravité de l'infraction.

Une justice plus réactive pour les grands délinquants de la route permettrait non seulement de rendre justice aux victimes plus rapidement, mais aussi de renforcer la prévention en montrant que les comportements les plus dangereux sont sévèrement punis.

Vers une harmonisation des sanctions

Il serait pertinent d'harmoniser les procédures pour que les infractions graves soient traitées avec la même célérité que les infractions mineures. Cela pourrait passer par la mise en place de tribunaux spécialisés ou de procédures accélérées pour les délits routiers les plus graves.

Par ailleurs, renforcer les moyens de la justice pour traiter ces affaires plus rapidement est indispensable. La modernisation des outils juridiques et administratifs pourrait également contribuer à une meilleure efficacité du système.

La prévention reste essentielle

Au-delà des sanctions, la prévention demeure un pilier incontournable de la sécurité routière. Florence Guillaume a exhorté les usagers de la route à adopter des « comportements responsables », notamment dans l'élan des Jeux olympiques et paralympiques et de la rentrée de septembre.

Des campagnes de sensibilisation ciblées, notamment auprès des usagers vulnérables comme les cyclistes et les motocyclistes, pourraient aider à réduire la mortalité dans ces catégories. L'éducation routière dès le plus jeune âge, l'amélioration des infrastructures et le renforcement des contrôles routiers sont autant de leviers à actionner.

Vers une justice routière équitable

La baisse des décès sur les routes cet été est une avancée, mais elle ne doit pas masquer les incohérences du système de sanctions routières en France. Pour que la sécurité routière progresse réellement, il est essentiel de garantir une justice équitable et rapide pour tous les usagers.

Les grands délinquants de la route ne doivent plus échapper à des sanctions immédiates. Une telle réforme contribuerait à renforcer la confiance des citoyens dans le système judiciaire et à dissuader les comportements les plus dangereux sur nos routes.