Renault Avantime : en retard plutôt qu'en avance ?

Renault Avantime : en retard plutôt qu'en avance ?

On entend ou lit souvent que l'étrange « coupéspace » produit par Matra pour Renault entre 2001 et 2003 était trop en avance sur son temps ! En réalité, c'est une façon élégante de digérer (ou de justifier) l'échec car le Renault Avantime, au contraire, était bel et bien en retard. Certes, le mariage de deux carrosseries – monospace et coupé – semblait innovant mais la vérité est toute autre : chez Matra comme chez Renault, on était en retard d'une guerre. Explication !

Renault Avantime

Renault avantime, en fait tard time...

A trop vouloir creuser un filon qu'on croit inépuisable, on finit par toucher le fond, et l'Avantime en est la parfaite illustration. Certes, depuis 1984, le losange profite d'un nouveau créneau, celui des Multi Purpose Vehicle (MPV) avec son Espace bien pensée. Mieux, elle en a décliné le concept vers le bas en proposant le Scénic à partir de 1996, avec succès. Pour développer encore et encore ce qu'on imagine un marché toujours prometteur, Renault va décider de rapatrier la production de l'Espace à Sandouville afin d'en augmenter la production grâce à l'utilisation de l'acier. En contrepartie de ce coup de Jarnac, on propose à Matra de réfléchir à un nouveau concept qui sera présenté sous une forme proche de l'Avantime en 1999.

Explorer le marché du monospace jusqu'au bout

Dans le même temps, le Scénic s'installe comme un best-selle, on conçoit un Espace IV plus grand, plus gros et plus cher, on lance une berline remplaçante de la Safrane tentant elle-aussi de gagner en volume intérieur : de plus en plus, Renault fait sien le fameux slogan « et si le luxe c'était l'Espace). Chez Matra, l'étrange oiseau qu'est l'Avantime se prépare alors qu'aucun marché n'existe. Et si Renault n'était pas en train de tirer sur un élastique qui allait lui péter à le gueule.

 

Or ailleurs se préparait une autre révolution : celle du SUV, initiée secrètement par Porsche et Volkswagen. Certes BMW avec le X5 et Mercedes avec le ML avaient lancé le mouvement, mais c'est surtout la sortie du Cayenne en 2002 qui mit le feu aux poudres : enfin, un SUV séduisait au delà d'une population marginale, marquant les esprits de consommateurs qui finirent pas ce dire que « si Porsche le fait, c'est que c'est bien ». 

Vouloir aller trop loin avec le Renault avantime

Voilà l'erreur commise par Renault : continuer à se fourvoyer dans la voie du « tout monospace » alors que la concurrence (et notamment les « premiums allemands », nouveaux faiseurs de tendance) était déjà passée à autre chose... et finalement les consommateurs aussi ! En outre, l'Avantime avait un style compliqué, s'avèrait chère à produire, sans parler des problèmes de conception des portes ou des moteurs peu glorieux (V6 essence, 4 cylindres essence ou dCi) : rien de très sexy sauf auprès de fanatiques du concept ou d'amateurs de collector sentant le flop arriver.

Renault Avantime

Ce qui devait arriver arriva : en 2003, faute de vente (et tout simplement de marché), Renault arrêtait les frais après 8 557 exemplaires. Le marché des monospaces plus largement commença à péricliter tandis que celui des SUV explosait. Renault persista bien jusque dans les années 2000 en lançant un Espace V lui aussi hybride, avec 5 portes mais une fausse ligne de coupé : sans grand succès. Une chose est sûre en tout cas : l'Avantime n'était pas en avance, juste très en retard !

Auteur : Luis Perenna