La Peugeot 205 GTI : une voiture de kéké ?

La Peugeot 205 GTI : une voiture de kéké ?

Je réponds tout de suite : Non... enfin oui... enfin non... Bref ça dépend ! Comme beaucoup, j'ai été marqué par la Peugeot 205 GTI : j'avais dix ans à l'époque et il faut bien l'avouer, c'était de la balle ! N'étant pas très « allemande » à l'époque (et toujours pas aujourd'hui, il faut l'avouer), ce petit bolide français, avec sa bouille à la fois rassurante et rondouillarde mais grimée avec les attributs de la sportivité (bandes latérales rouges, sigle GTI ou tapis de sol du même acabit) semblait venir d'un autre planète : la 205 SR de ma grand-mère paraissait grâce à ces artifices presque sportive.

Peugeot 205 GTI

A cette époque (id est à partir de 1984 et de la sortie de la GTI, d'autant que la Turbo 16 commençait à engranger les titres en rallye), la Peugeot 205 dans ses attributs sportifs devenait un « must have ». C'était la voiture des jeunes cadres dynamiques, ceux qui, dans ces années folles du pognon et de la cocaïne, n'avaient pas encore d'enfants, un peu d'argent et pas forcément les compétences pour conduire une Porsche 911 « G » encore délicate à conduire. La vraie force des GTI de l'époque c'était bel et bien cette facilité de conduite qu'aucune voiture ne procurait jusqu'alors !

Acheter une Peugeot 205 GTI à l'époque, c'était afficher une certaine réussite, une envie de « sport » tout en restant raisonnable. Voilà d'ailleurs pourquoi Golf et 205 dévastaient le marché : la concurrence n'avait que des tombeaux ouverts à proposer en échange, que cela soit Ford et sa Fiesta, Rover et sa Metro, Fiat et sa Uno, toutes semblaient patiner là où Golf et 205 restaient sur la route. Les autres voitures étaient affaire de spécialistes (ou de suicidaires) quand la française ou l'allemande offraient un choix rationnel allié à (beaucoup) de plaisir.

Peugeot 205 GTI

Peugeot 205: Une voiture de kéké à l'époque

Comment, avec le temps, la 205 GTI est-elle devenue une voiture de kéké ? Il y a eu deux phases : la première est sans doute la plus terrible, l'entrée sur le marché de l'occasion pure, quand la voiture n'est plus au catalogue, qu'elle rentre dans les eaux troubles du « je ne vaux plus rien » et qu'apparaissent les sans grades, ceux (dont j'aurai pu faire partie) qui n'ont pas les moyens de leurs ambitions, et qui achètent à bas prix des voitures performantes. A cette époque, personne ne pense collection et tout le monde pense « je la rince et je la mets à la casse ». C'est à ce moment précis (on  va dire la fin des années 90 et le début des années 2000) que la voiture en question devient une voiture de kéké.

A cette époque, la nostalgie n'est pas encore présente, et personne n'imagine encore que la 205 GTI deviendra un « must have » à nouveau. L'effet de mode est passé, tandis que la production du moment dépasse largement les performances de la vieille mamie qu'elle est devenue ! Autant dire que, comme la Citroën DS au début des années 80, le garagiste file 200 balles au pilote amateur pour le débarrasser de l'épave qui encombre son parking. Les bagnoles sont alors transformées, ou alors épuisées par l'effort des travers sur les petites routes de provinces. Elles sont même parfois enroulées autour des platanes, kitées, tunées, modifiées. N'en reste plus qu'une mauvaise réputation qui faisait qu'au début des années 2000, une 205 GTI s'échangeait entre 500 et 1000 euros.

Peugeot 205 GTI

Le manque d'imagination au pouvoir 

Puis, peu à peu, le jeune branleur des années 80 devient un quadra des années 2010. Il a un peu plus d'argent, beaucoup de nostalgie, et est prêt soit à s'acheter son rêve de l'époque, soit son délire de la fin des années 90 : une petite bombe à tout faire rigolote. Les prix montent, car tout le monde a la même idée en même temps. Et la voiture devient à nouveau une voiture de kéké. Celle que tout le monde doit avoir au même moment !

Pourtant, il existe tant d'alternatives afin d'échapper à l'hystérie collective. Il faut croire que certains préfèrent payer trop cher, quand d'autres préfèrent maugréer dans leur barbes, alors que tant de solution amusantes existent en automobile pour compenser le prix excessif. Une voiture ne vaudra jamais plus que ce que vous voulez y mettre. Dans mon imaginaire, il y a tellement de voitures de la même époque qu'une 205 GTI qui me font envie, pour dix fois moins d'argent, que je reste abasourdi devant ce manque d'imagination et de mauvaise foi : non, rouler en 205 GTI aujourd'hui, c'est être un kéké, comme à l'époque d'ailleurs !

Auteur : Luis Perenna